À propos

À propos - Chaire de recherche du Canada en communication interculturelle et technologies de gestion en contexte pluraliste (CRC-CITGCP)

La Chaire

Mise en contexte

Les changements sociaux profonds que la « super-diversité » (Vertovec, 2007) amène placent les sociétés occidentales dans une position d’action : choix des immigrants, politiques d’accueil, etc. Dans les régions, c’est-à-dire en dehors des grands centres urbains comme Montréal, Toronto ou Vancouver, la question de l’(im)migration[1] rencontre des défis particuliers, dont la faible présence d’immigrants ou le manque d’appuis spécialisés (Banerjee & Phan, 2014 ; Forstenlechner & Al-Waqfi, 2010 ; Frozzini, en évaluation ; Frozzini & Law, 2017a, 2017b ; Jones & Lewis, 2011 ; Tiboulet, Dambrun, Tourret, & Uhlen, 2012). Au Québec, tout comme ailleurs au Canada, nous sommes confrontés à des tendances lourdes dont le vieillissement de la population, le départ des jeunes vers les grandes villes et un manque de main-d’œuvre (Côté, Savard, & Scarfone, 2017 ; Normand, 2018 ; Posca, 2019a, 2019b). Pour y remédier, les entreprises et les villes cherchent à recruter vers des personnes issues de l’(im)migration (Ville de Saguenay, 2018 ; Ville de Saguenay et Foglia, 2018 ; FRQSC-MIDI, 2014), et ce, en dépit d’un contexte où il semble y avoir une montée du populisme ambiant (Human Rights Watch & Roth, 2017) et un discours anti-immigration persistant (Besco & Tolley, 2018). À ce contexte, s’ajoute une tendance à catégoriser les (im)migrants comme une population dont on surveille et contrôle (Hass & Shuman, 2019; Fassin. 2011; Muller, 2004) la mobilité ou l’accès aux services à l’aide des technologies permettant une telle gestion.

Objectifs

Dans ce contexte, la rencontre, la cohabitation et la collaboration au sein de la société peuvent être affectées par notre engagement technologique au monde (la volonté de contrôle présente dans notre engagement productif au monde), car l’idée de réciprocité et d’égalité propre à une vision interculturelle semble disparaître. Ce projet propose donc d’interroger la communication interculturelle (CI) qui opère au niveau des interactions (interpersonnelles et intergroupes) dans diverses sphères sociales (travail, santé, éducation, loisirs, etc.) en portant attention aux articulations qui s’effectuent avec les technologies de gestion (TG) de la population (c.-à-d., cette tendance au contrôle et à la surveillance par divers moyens). Parmi ces moyens, nous retrouvons les prescriptions administratives (par exemple, les codes, les documents, les ententes, les programmes, les lois, etc.). Il est connu que la rencontre de l’autre s’effectue toujours dans un contexte précis où les écarts culturels doivent être pris en compte (Gratton, 2009 ; White, Gratton, & Rocher, 2015).
Toutefois, les mécanismes inscrits dans la communication et les représentations sociales, que chaque groupe social peut avoir d’autres groupes, s’inscrivent dans la structure sociale, politique et culturelle de diverses façons et semblent être marqués par notre engagement productif au monde qui nous oriente vers la conception de tout ce qui nous entoure comme un outil à manipuler (Barney, 2000 ; Heidegger, 1958 ; Tabachnick, 2013).
Cet engagement technologique est marqué par une volonté de contrôle qui ne se limite pas aux choses et peut aussi s’appliquer à nos rapports à l’autre (Foucault, 1967, 2000). C’est ici que l’originalité de cette programmation de recherche prend son sens, car les questions liées à la communication interculturelle (interactions lors des relations interpersonnelles et intergroupes) n’ont pas été analysées en portant attention à leur articulation avec les technologies de gestion de la population. En effet, on reste habituellement au niveau macrosocial des analyses (Magnet & Gates, 2009) en portant attention aux incidences politiques ou individuelles sans regarder les interactions de façon plus fine.
Dans ce contexte, quels sont les articulations entre les TG et la CI ? Quels sont les facteurs sous-jacents de ces articulations qui permettent de mieux comprendre les transformations sociales à l’ère de la super-diversité ? L’objectif général du programme de recherche est donc de définir et de comprendre les articulations entre les TG et la CI, car elles semblent constituer un guide à l’organisation du monde, c’est-à-dire qu’elles peuvent avoir des influences majeures dans la structuration (Giddens, 1986) des relations sociales. Pour y parvenir, le programme de recherche se décline en cinq objectifs :

  1. Identifier et comprendre les éléments de la communication interculturelle.
  2. Identifier et comprendre les éléments propres aux technologies de gestion et les liens qui peuvent être effectués avec les représentations sociales que la société peut avoir des personnes issues de l’(im)migration.
  3. Comprendre la complexité des interactions dans diverses sphères sociales avec la présence des technologies de gestion.
  4. Développer une approche théorique de la communication interculturelle et des technologies de gestion comme des éléments essentiels au processus de structuration de la société.
  5. Développer des outils et des stratégies favorisant le transfert des nouvelles connaissances vers le monde académique et la population générale afin de permettre une analyse critique du processus d’inclusion des personnes issues de l’(im)migration.

Ces travaux aideront la collectivité à prendre des mesures concrètes autour de la rencontre, la cohabitation et la collaboration dans la société. De plus, ils permettront l’élaboration de politiques et des programmes d’intervention répondant mieux aux besoins du processus d’inclusion des personnes issues de l’(im)migration.


[1] Cette graphie (Sharma, 2001) permet de signifier les similitudes des conditions sociales et les différences de statut entre migrants et immigrants.